Terraqua a accompagné Eaux de Vienne-Siveer pour l'identification des zones prioritaires pour la protection de captages

Avec la volonté d’améliorer la qualité des eaux distribuées à ses abonnés, le syndicat Eaux de Vienne-Siveer mène de nombreuses investigations visant à affiner la connaissance des écoulements d’eau souterrains et des transferts potentiels de polluants jusqu’à ses différents captages. C’est dans ce cadre qu’a été initiée une étude des transferts rapides au sein de l’Aire d’Alimentation des Captages (AAC) d’eau potable de Destilles (Saint-Martin-l’Ars) et Croix de Boisse (Availles-Limouzine).

En effet, la nappe souterraine exploitée se développe dans un aquifère calcaire, au sein duquel des phénomènes de dissolution ont lieu : l’eau de pluie, légèrement acide, attaque la calcite (minéral composant majoritairement le calcaire) en s’infiltrant dans la roche. Bien que cette dissolution se produise à un rythme très lent, cela se traduit, après des milliers voire des millions d’années, par la formation de boyaux et de chenaux dans la roche, où l’eau peut circuler de manière plus rapide.

Du point de vue de la préservation de la qualité des ressources en eau, l’identification et la caractérisation de ces réseaux naturels est donc stratégique : ces « connexions rapides » aux captages favorisent l’apparition de pics de pollution (arrivées d’eaux chargées en nitrates et/ou produits phytosanitaires), et atténuent la capacité d’épuration naturelle du sous-sol par rapport à une infiltration lente et diffuse. Il est donc essentiel pour la collectivité d’intervenir de manière prioritaire sur les secteurs où les écoulements de surface sont connectés à de tels réseaux souterrains, afin de contribuer à y limiter les émissions de polluants (via la mise en place de plans d’actions).

Au sein de l’AAC (territoire comprenant l’ensemble des secteurs depuis lesquels l’eau peut ruisseler sur le sol et/ou s’infiltrer en sous-sol jusqu’à atteindre les captages) de Destilles et Croix de Boisse, des zones d’infiltration préférentielle ont été identifiées par la Chambre d’Agriculture de la Vienne. Sur la base de cet inventaire, Terraqua a été missionné afin de :

  • Confirmer les zones d’infiltration préférentielle à investiguer ;
  • Caractériser les flux (débit et qualité de l’eau) pouvant transiter par ces réseaux ;
  • Vérifier la connexion hydraulique pouvant exister entre une zone d’infiltration et le captage de Destilles.

Confirmation des zones d’infiltration préférentielle (ZIP)

Les ingénieurs de Terraqua ont réalisé une analyse critique des zones mises en évidence par l’étude de la Chambre d’Agriculture, ainsi que la recherche d’éventuelles ZIP non répertoriées, par la compilation de données issues de la bibliographie et par la réalisation d’expertises de terrain. Ces dernières ont été menées sur deux périodes distinctes : l’une en période humide, et l’autre en période sèche, afin d’appréhender au mieux leur comportement en fonction des conditions hydrologiques.

Sur la base de ce travail, une hiérarchisation des ZIP a été établie, par croisement des caractéristiques hydrogéologiques de ces secteurs, mais aussi des caractéristiques de leur environnement pouvant témoigner de l’intensité de la pression polluante d’origine anthropique pouvant être exercée localement. Trois écoulements superficiels, pouvant être en lien avec les ZIP les plus sensibles, ont ensuite été retenus pour la phase de caractérisation des flux.


Caractérisation des flux d’eau

Terraqua a réalisé, au droit de ces trois écoulements superficiels :

  • Un suivi de débit continu :
    Mise en place de stations de suivi automatique des niveaux d’eau ;
    Réalisation de mesures manuelles ponctuelles du débit au droit des stations ;
    Établissement des courbes de tarage des stations (permettant d’associer un débit à un niveau d’eau enregistré).
  • Un suivi qualitatif ponctuel :
    Réalisation de 12 campagnes de prélèvements d’eau au droit des 3 stations de débit ;
    Analyses, sur ces échantillons, des principaux micropolluants retrouvés au captage (nitrates et pesticides), afin d’évaluer l’importance des flux de polluant ;
    Réalisation de 2 campagnes de prélèvements d’eau au droit de 20 points d’eau superficielle et souterraine répartis au droit et autour de l’AAC de la source de Destilles ;
    Analyses, sur ces échantillons, des bilans ioniques, afin de déterminer le faciès géochimique de ces eaux, et ainsi identifier de potentielles origines différentes.

 

L’analyse des données a notamment permis de mettre en évidence que :

  • Le captage de la source de Destilles présentait une qualité d’eau plus dégradée et une sensibilité plus importante aux flux rapides ;
  • L’interfluve Clain-Clouère pourrait jouer un rôle plus important que pré-supposé dans le marquage constaté à Destilles.

A partir des données recueillies lors des campagnes de prélèvements réalisées autour des captages, à différentes périodes hydrologiques, une cartographie de la qualité des eaux dans l’interfluve Clain-Clouère a pu être réalisée, afin de mettre en évidence les secteurs susceptibles de contribuer au marquage constaté à Destilles.


Vérification de la connexion hydraulique d’une zone d’infiltration

L’une des zones d’infiltration préférentielle identifiée dans l’interfluve Clain-Clouère se situait à la limite de l’AAC. Eaux de Vienne-SIVEER a donc souhaité vérifier si une connexion hydraulique existait avec le captage.

Terraqua a alors mis en œuvre un traçage hydrogéologique : un colorant (de la fluorescéine, inoffensive pour la faune et la flore) a été injecté dans un petit écoulement superficiel à l’amont de la zone d’infiltration. Un capteur (fluorimètre), préalablement positionné dans le trop-plein de la source, a permis de suivre en temps réel (par télétransmission des données) la restitution du traceur au captage.

Ce dispositif, connecté au système de pilotage de l’exploitation du captage, permettait notamment d’anticiper un arrêt de pompage dans l’éventualité où la concentration du traceur serait jugée trop importante. En effet, s’il est inoffensif pour l’homme, le traceur peut néanmoins être un facteur d’inquiétude pour la population, du fait de l’obtention d’une eau verte au robinet. Finalement, le traceur a bien été retrouvé à la source (taux de restitution supérieur à 20%), mais sa concentration n’a pas généré de perturbation de l’exploitation.

Le résultat de ce traçage a permis d’attester la relation hydraulique
entre la ZIP testée et la source, et a ainsi conduit Terraqua à proposer
une modification de la délimitation actuelle de l’AAC : intégration du
bassin-versant topographique à l’amont de cette perte, qui n’était pas
inclus jusqu’alors.